Comme le secteur de l’esthétique, le marché de la prothésie ongulaire a souffert de la crise sanitaire. Martine Bérenguel, co-présidente de la CNAIB-Spa, dresse l’état des lieux et revient sur la nécessité d’encadrer cette profession.
Beauty Forum : Après deux années compliquées, quel est aujourd’hui l’état du marché de la prothésie ongulaire ?
Martine Bérenguel : Le métier de l’ongle, qui représente aujourd’hui environ 15 % du marché de l’esthétique, a connu un grand boom durant les 10 années qui ont précédé la pandémie. La crise sanitaire n’ayant évidemment pas épargné notre secteur, cette profession a elle aussi souffert depuis 2020. Même si les clientes sont revenues depuis dans les instituts de beauté, le télétravail, toujours partiellement en vigueur, ralentit l’activité du secteur de l’ongle, puisque les femmes ont moins besoin de se maquiller et de se faire les ongles. On note aussi que pour les bars à ongles installés dans les centres commerciaux, la reprise est plus compliquée : ils n’ont pas à ce jour retrouvé le chiffre d’affaires de 2019. On remarque également le développement des prestations ongles à domicile, notamment parce que certaines employées qui exerçaient en salon ou en institut ont fait le choix de se réorienter vers le domicile. Toutefois, comme de plus de plus de femmes sont adeptes des prestations ongles, je pense que cette tendance à la baisse va se réguler mais qu’il faudra attendre encore quelques mois avant que l’activité revienne à la normale.
B. F. : Les formations au métier de prothésiste ongulaire se multiplient mais toutes ne se valent pas : comment faire le bon choix pour quelqu’un souhaitant se lancer ?
M. B. : Je conseillerais en premier lieu de se tourner vers le CQP styliste ongulaire, qui a été imaginé et proposé par la branche de l’esthétique car il y avait un vrai besoin de qualification. Il permet d’acquérir des connaissances sur les phanères, la peau, d’apprendre les bases du métier, l’hygiène, le placement car les gestes sont répétitifs, etc. En revanche, une professionnelle de l’esthétique titulaire du CAP, qui n’aurait pas le budget ou le temps de s’engager dans le CQP styliste ongulaire, peut tout à fait suivre une formation continue, à condition qu’elle inclut un certain nombre d’heures d’enseignement. Quand je vois que certaines personnes apprennent ce métier en suivant des tutos sur internet, je prends peur !
B. F. : Faudrait-il selon vous en encadrement plus strict de la pratique ?
M. B. : Il faut en effet un encadrement très strict de la pratique, car le métier de prothésiste ongulaire touche à l’humain, à l’intégrité de la personne : le risque d’infection ou de simplement abîmer les ongles n’est pas négligeable. Il exige aussi la maîtrise de techniques liées au soin de l’ongle, qui entrent dans le champ de la profession d’esthéticienne. Une personne diplômée aura aussi des notions de rentabilité, ce qui lui permettra de mieux gagner sa vie. On voit fleurir des prestations réalisées par des personnes n’ayant reçu aucune formation et cela pénalise les vraies professionnelles. C’est pourquoi nous demandons depuis longtemps que le métier de prothésiste ongulaire soit assujetti à l’obtention du CAP. Enfin, il faudrait faire prendre conscience aux clientes que s’adresser à des personnes qui travaillent de façon officieuse et pratiquent des prix défiant toute concurrence, pénalise la qualité du travail. Car n’oublions pas qu’un tarif très bas est souvent synonyme de produits pas chers, donc de mauvaise qualité.
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